Une découverte majeure sur l’impact du tabagisme sur l’immunité
Violaine Saint-André, première auteure de l’étude et ingénieure de recherche au sein de l’unité immunologie translationnelle à l’Institut Pasteur, affirme que cette découverte est cruciale pour mieux appréhender les effets du tabagisme sur l’immunité. Plusieurs éléments ont une incidence majeure sur les réponses immunitaires, tels que l’âge, le sexe, les gènes et le tabac. C’est ce que montrent les recherches d’une équipe de scientifiques de l’Institut Pasteur. Le tabac a non seulement un impact à court terme sur l’immunité, mais aussi des conséquences à long terme. En effet, certains mécanismes de défense de l’organisme altérés chez les fumeurs demeurent affectés pendant de nombreuses années après l’arrêt du tabac. Selon l’Institut Pasteur, ces résultats « mettent en évidence pour la première fois une mémoire à long terme des effets du tabagisme sur l’immunité ». Les conclusions de cette étude, réalisée grâce à la cohorte Milieu Intérieur qui suit les variations des réponses immunitaires chez 1 000 volontaires sains, sont publiées dans la revue Nature, le mercredi 14 février.
Les facteurs ayant le plus d’influence sur les réponses immunitaires
Les chercheurs ont exposé des échantillons sanguins à une grande variété de microbes (virus, bactéries, etc.) et observé la réaction du système immunitaire en mesurant les niveaux de cytokines sécrétées. Grâce aux nombreuses informations recueillies sur les individus de la cohorte, l’équipe a pu identifier les variables parmi les 136 sélectionnées (indice de masse corporelle, tabagisme, nombre d’heures de sommeil, activité physique, maladies infantiles, vaccinations, lieu de vie, etc.) ayant le plus d’impact sur les réponses immunitaires étudiées. Trois variables se sont distinguées : le tabagisme, l’infection latente au cytomégalovirus et l’indice de masse corporelle. « Ces trois facteurs pourraient avoir autant d’influence sur certaines réponses immunitaires que l’âge, le sexe ou les variables génétiques », souligne Darragh Duffy, responsable de l’unité immunologie translationnelle à l’Institut Pasteur.
Réponse inflammatoire accrue chez les fumeurs
L’analyse des données a montré que la réponse inflammatoire, qui se déclenche spontanément lors de l’infection par un pathogène, était plus élevée chez les fumeurs et que l’activité de certaines cellules impliquées dans la mémoire immunitaire était perturbée. Cette étude révèle que le tabagisme affecte non seulement des mécanismes de l’immunité innée mais aussi certains mécanismes de l’immunité adaptative. « En comparant les réponses immunitaires de fumeurs et d’anciens fumeurs, nous avons constaté que la réponse inflammatoire revenait rapidement à la normale après l’arrêt du tabac, mais que l’impact sur l’immunité adaptative perdurait dans le temps, pendant 10 ou 15 ans », déclare Darragh Duffy.
La mémoire à long terme des effets du tabagisme sur l’immunité
Il semblerait que le système immunitaire conserve en mémoire les effets du tabac sur le long terme. « Lorsque nous nous sommes aperçus que les profils des fumeurs et des anciens fumeurs étaient similaires, nous avons immédiatement suspecté l’implication de processus épigénétiques. Et nous avons, en effet, mis en évidence que l’effet à long terme du tabagisme sur les réponses immunitaires était associé à des différences de méthylation de l’ADN – susceptibles de modifier l’expression de gènes impliqués dans le métabolisme des cellules immunitaires – entre les fumeurs, les anciens fumeurs et les non-fumeurs », explique Violaine Saint-André.
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